La vente à distance est une méthode de vente très répandue qui permet au consommateur de bénéficier d’un service ou d’acquérir un bien sans que celui-ci ne soit présent dans l’établissement du commerçant.
La vente à distance a connu un réel essor avec le développement des nouvelles technologies.
Elle peut revêtir plusieurs facettes et notamment le démarchage téléphonique.
Le démarchage téléphonique consiste à contacter un consommateur afin de lui proposer un service ou un produit sans que le consommateur n’ait effectué de demande en ce sens. Cette technique de vente, parfois appelée « appel à froid », est désormais très répandue en assurance.
État des lieux
Depuis 2014, l’ACPR a eu à plusieurs reprises l’occasion, dans le cadre de ses conférences ou par le biais de publications (notamment celle du 19 juin 2018), de rappeler ce qu’elle attendait des intermédiaires d’assurance en terme de devoirs d’information et de conseil dans le cadre du démarchage téléphonique.
Puis, constatant des dérives croissantes, l’ACPR a sanctionné trois courtiers qui ne respectaient pas ses attentes en 2016, 2017 et 2019.
En parallèle, la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes (DGCCRF), saisie de plusieurs réclamations de particuliers ayant été démarchés, a diligenté des enquêtes. Celles-ci ont mis en lumière des pratiques commerciales problématiques, contraignant la DGCCRF a prononcer des avertissements, des injonctions et à dresser des procès-verbaux en 2018. Dans un communiqué du 9 octobre 2019, l’ACPR rappelait à « certains d’acteurs du marché qu’ils devaient corriger leurs pratiques » constatant que certaines n’étaient pas assez protectrices pour le consommateur.
Depuis, existe un débat nourri entre compagnies, associations de consommateurs qui souhaitent l’interdiction pure et simple du démarchage téléphonique compte tenu des abus constatés, et intermédiaires d’assurance qui soulignent que ces mauvaises pratiques ne concernent qu’une partie de la vente à distance et quelques acteurs.
Ce qui pose problème
La problématique dans la vente à distance et plus particulièrement dans le démarchage téléphonique est de savoir comment concilier démarchage, autrement dit, le fait de solliciter un consommateur pour lui proposer la souscription d’un contrat d’assurance alors même qu’il n’est pas à l’initiative de la démarche, et consentement éclairé du consommateur.
En effet, le contrat d’assurance est un contrat consensuel ; il est donc parfait dès la rencontre des volontés de l’assuré et de l’assureur ou de son mandataire (l’agent ou le courtier bénéficiant d’une délégation de souscription de la compagnie). Dès lors, si le consommateur donne son accord même verbal, il est engagé du fait du principe du consensualisme et ce, sans qu’aucune forme particulière ne soit nécessaire, la signature du contrat n’étant qu’une condition de preuve du contrat d’assurance et non de sa validité.
Par exemple, lorsqu’un consommateur est sollicité par téléphone pour souscrire un contrat d’assurance, le client se voit proposer un contrat alors même qu’il n’en avait pas exprimé le besoin et n’a pas forcément conscience qu’à l’issue de l’entretien téléphonique il peut être engagé car dans son esprit, seule la signature du contrat matérialisera son accord.
En fait, la difficulté n’est pas tant le démarchage téléphonique en lui-même mais « la vente en un temps », c’est-à-dire le fait que le client n’a pas véritablement le temps de prendre connaissance des documents contractuels qui lui permettraient de donner son consentement éclairé sur le contrat qui lui est proposé alors même qu’il n’avait formulé aucune demande.
Même si le consommateur dispose d’un droit de renonciation, ce droit peut paraître insuffisant dans le cadre d’un démarchage qui est par essence non sollicité.
Le dispositif législatif actuel est-il suffisamment protecteur du consommateur ?
Devant l’ampleur de la polémique, le Comité consultatif du secteur financier (CCSF) , qui regroupe sous l’égide de la Banque de France notamment des courtiers, des assureurs et des associations de consommateurs, a adopté un avis le 19 novembre 2019 relatif au démarchage téléphonique en matière d’assurance.
Il préconise de bonnes pratiques en matière de démarchage téléphonique, à mettre en oeuvre au plus tard à la fin du premier semestre 2020, qui visent à mettre fin à la vente en un temps et permettre au consommateur de donner un consentement qui se veut éclairé.
Dans le prolongement de cet avis, l’ACPR, dans un communiqué du 26 novembre 2019, enjoint les professionnels de l’assurance à rapidement mettre en pratique les préconisations du CCSF et prévient qu’elle « poursuivra ses contrôles », invitant les acteurs « à mettre en place des mécanismes de contrôle de la qualité des ventes reposant notamment sur une conservation des enregistrements téléphoniques ».
De plus, une proposition de loi visant à encadrer le démarchage téléphonique et à lutter contre les appels frauduleux, portant sur l’encadrement des appels à visées commerciales sera examinée à l’Assemblée Nationale en janvier 2020•
Préconisations du CCSF en cas de démarchage téléphonique
- Si le prospect n’est pas intéressé, le distributeur s’engage à ne pas le rappeler.
- Le recueil du consentement ne peut être effectué lors d’un appel.
- Le consentement doit être écrit (ex : signature manuscrite ou électronique d’un projet de contrat, d’un devis, des conditions particulières ou réponse par courrier électronique ou système de communication sur un espace sécurisé en ligne).
- Lettre de bienvenue adressée par la suite indiquant clairement que le client est engagé, le droit de renonciation et les coordonnées du service de réclamation.